RETRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE DU REPRESENTANT SPECIAL DU SECRETAIRE GENERAL DES NATIONS UNIES POUR LA COTE D’IVOIRE, BERT KOENDERS, DU 27 JUILLET 2012
Abidjan, le 26 juillet 2012…
Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la Côte d’Ivoire, M. Bert Koenders, s’est entretenu vendredi, 27 juillet 2012, avec la presse sur quelques-uns des messages-clefs de la Résolution 2062 du Conseil de Sécurité des Nations Unies et la situation à Duékoué depuis les événements de la semaine passé. C’était lors de la conférence de presse hebdomadaire de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire :
Kenneth Blackman (porte-parole adjoint de l’ONUCI) : Chers confrères et consœurs, bonjour. Aujourd’hui, on a un invité de marque, le Représentant spécial, qui va vous entretenir sur la nouvelle résolution et aussi sur ce qu’on fait suite aux événements dans l’Ouest. Je lui laisse la parole.
Bert Koenders : Merci beaucoup M. Blackman. Mesdames et messieurs les journalistes et chers collègues, bonjour. Comme M. Blackman l’a dit, je voudrais soulever deux points ce matin dans cette conférence de presse. Premier point, les grands messages de la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU après mes discussions, que je voudrais qualifier comme intensifs, à New York sur la situation ivoirienne et aussi je voudrais vous informer sur la situation après les événements à Duekoué la semaine dernière.
Vous savez, je reviens de New York dans le cadre de la présentation du 30e rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la situation en Côte d’Ivoire. Permettez-moi, à titre d’information, de mentionner un certain nombre de points soulevés dans la résolution. Je crois qu’ils sont les plus importants dans le contexte de discussions que j’ai eues avec le Conseil de sécurité, qui a loué, du reste, les efforts consentis par les autorités ivoiriennes pour le retour progressif à la stabilité et à la normalité institutionnelle dans le pays.
Je voudrais commencer avec la situation des droits de l’homme, qui était soulignée par les membres du Conseil de sécurité. Je crois qu’il a eu une critique de la situation. La formulation est très précise.
Le Conseil de sécurité “Prie instamment le Gouvernement ivoirien de veiller le plus rapidement possible à ce que, quels que soient leur statut ou leur appartenance politique, tous les auteurs de violations graves des droits de l’homme ou d’atteintes au droit international humanitaire, en particulier celles commises pendant la crise postélectorale en Côte d’Ivoire, soient traduits en justice, comme le lui imposent ses obligations internationales”. Il prie également le Gouvernement de veiller, le plus rapidement possible “à ce que tous les détenus soient informés de leur statut en toute transparence et engage le Gouvernement ivoirien à continuer de coopérer avec la Cour pénale internationale”. Je lance donc un appel au Gouvernement ivoirien à mettre fin à l’impunité, et à donner aux détenus une idée claire de leur statut, et cela en toute transparence.
Un deuxième point souligné dans la résolution est la nécessité urgente de faire plus sur le plan de la justice et de la réconciliation. Cela est exprimé très clairement au paragraphe 10 de la résolution, dans lequel le Conseil, et je cite, « souligne qu’il faut prendre des mesures concrètes pour promouvoir la justice et la réconciliation à tous les niveaux et de tous les côtés, notamment en faisant participer activement les groupes de la société civile, l’objectif étant de remédier aux causes profondes des crises que connaît la Côte d’Ivoire”. Là, il y a une certaine demande du Conseil de sécurité d’accélérer le processus.
Toujours au niveau du paragraphe 10 de la résolution, le Conseil “exhorte le Gouvernement ivoirien à prendre des mesures concrètes pour prévenir et réprimer les violences intercommunautaires en essayant de dégager un large consensus national sur la façon de régler les questions d’identité et de propriété foncière”. Ca aussi, je crois, c’est un appel très clair du Conseil de sécurité aux Ivoiriens.
Un autre volet - j’ai mentionné droits de l’homme, justice - que je crois être important c’est le dialogue politique. Là, le Conseil de sécurité, dans mon opinion, a été très précis. Il « se félicite que le Gouvernement ait entrepris d’intensifier le dialogue politique avec l’opposition, y compris avec les partis politiques non représentés à l’Assemblée nationale,” - je crois que c’est le plus important - et “demande au Gouvernement ivoirien de continuer de prendre rapidement des mesures concrètes à cette fin et de ménager un espace politique à l’opposition”.
Je crois que, là aussi, le message est clair. Il demande au Gouvernement des mesures concrètes à ces fins et d’aménager un espace politique à l’opposition. En même temps, il demande à tous les partis politiques de jouer un rôle constructif et concourir à la réconciliation tout en me priant en tant que Représentant spécial du Secrétaire général Ban Ki-Moon, de continuer d’ exercer [mes] bons offices pour faciliter le dialogue entre tous les acteurs politiques”. Le message est aussi assez clair ici. Je pense que c’est quelque chose que nous n’avions pas vu encore, [cette] spécificité dans la résolution du Conseil de sécurité. Je crois que je ne vais pas évoquer tous les aspects de la résolution du Conseil de sécurité. […]
Sur le secteur de la sécurité, je crois que tout le monde sait que c’est une priorité du Gouvernement Ivoirien, c’est une priorité de tous les Ivoiriens en fait. Là, on est un peu spécifique qu’avant. Le Conseil “prie instamment le Gouvernement ivoirien d’accélérer la mise au point et l’exécution d’une stratégie globale de réforme du secteur de la sécurité, pour que soient mises sur pied des forces de sécurité sans exclusive et comptables de leurs actes, avec l’appui de l’ONUCI […] et d’autres partenaires internationaux concernés”. Je crois que c’est important “d’adopter d’autres mesures propres à inspirer une confiance accrue au sein des différents services chargés d’assurer la sécurité et de faire respecter la loi”, ainsi qu’entre ces services, “et de rétablir l’autorité de l’État dans tout le pays”.
Le DDR (désarmement, démobilisation et réintégration), je crois que je vais souligner ce point aussi, c’est l’avant dernier point sur la résolution. Bien sûr, cela constitue une grande priorité pour le Conseil. Au paragraphe 7 de la résolution, il “exhorte le Gouvernement ivoirien à concevoir et à exécuter rapidement un programme national de DDR, à définir des critères d’admission clairs et rigoureux, à créer une nouvelle base de données sécurisée et transparente, à mettre en place une autorité centrale chargée de superviser tous les éléments du programme de DDR et à trouver des solutions propices à l’intégration socioéconomique durable des ex-combattants”. La résolution “ engage aussi l’ONUCI à faciliter la planification et l’exécution des programmes. Le nouveau élément, c’est d’avoir une nouvelle base de données sécurisées et transparentes - une autorité pour faire avancer le DDR.
Sur le plan institutionnel, et là encore dans le cadre du processus démocratique, le Conseil de Sécurité définit clairement les conditions à remplir pour que les élections locales et régionales soient un outil réel de réconciliation ... Alors, après la question des droits de l’Homme, justice, DDR, je parle maintenant des élections locales qui ont été discutées avec une certaine intensité à la réunion du Conseil de sécurité. Le Conseil “demande au Gouvernement ivoirien et à tous les acteurs politiques de veiller à ce que les prochaines élections locales soient ouvertes, transparentes, libres et régulières et se déroulent dans le calme, et à ce qu’elles favorisent la représentativité politique et la réconciliation, en choisissant une date opportune, en assurant la sécurité et en procédant aux réformes électorales utiles”. Je crois que c’est le message le plus important du Conseil de sécurité pour avoir des élections de réconciliation. Donc, il est important de choisir une date opportune. C’est la décision, bien sûr, du gouvernement Ivoirien, être sûr que la sécurité est là, et procéder aux reformes électorales utiles. Cà, c’est spécifique dans la résolution. Et il a dit aussi qu’il incombe au premier chef au Gouvernement ivoirien d’organiser les élections locales, bien sûr, aux cotés des organisations du Gouvernement ivoirien, et autorise une assistance de l’ONUCI pour ces élections. Mais c’est très strict, parce qu’on dit « en fonction des ressources » que nous avons. Mais, je vous dis que nous n’avons pas beaucoup de ressources. Je crois que la consigne du Conseil est là : il y a la première responsabilité du Gouvernement; ces élections peuvent être un élément de réconciliation, mais il faut penser aux le timing approprié et aux éléments que j’ai mentionnés ; ca veut dire les reformes électorales utiles et la sécurité.
Je voudrais finir par ce message-clé du Conseil de sécurité aux Ivoiriens. C’est clair que le Conseil de sécurité a, dans sa résolution, aussi renforcé la politique de décentralisation de notre mission. Vous savez que nous avons ouvert des bureaux à Guiglo, à Toulepleu, à Tai… pour la nécessité que vous connaissez, et les zones à risque en particulier dans l’Ouest.
Le dernier point que je voudrais souligner [est que] le Conseil de Sécurité reste détermine à poursuivre son engagement vis-à-vis la Côte d’Ivoire en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, ce qui implique que les Nations Unies peuvent utiliser tous les moyens nécessaires pour protéger les civils et son mandat.
En ce qui concerne la situation dans l’Ouest du pays, je viens lentement de la résolution à la situation au camp de Nahibly. Je crois que c’est important, le Conseil de sécurité a aussi dit quelque chose sur la situation. Le Conseil condamne fermement “tout acte d’intimidation, toute menace et toute attaque visant des réfugiés et déplacés en Côte d’Ivoire, dont l’attaque du 20 juillet 2012” contre le camp de déplacés de Nahibly. Et il “rappelle que le Gouvernement ivoirien est le premier garant de la paix, de la stabilité et de la protection de la population civile en Côte d’Ivoire”. Ca, c’est la résolution du Conseil de sécurité, qui “rappelle que le Gouvernement ivoirien est le premier garant de la paix, de la stabilité et de la protection de la population civile en Côte d’Ivoire”.
J’aimerais maintenant que nous parlions de la situation dans l’Ouest du pays et de Nahibly. Je suis revenu immédiatement à Abidjan, après les discussions à New York. J’avais projeté d’autres plans, mais j’étais très touché et choqué, personnellement, par ce qui s’est passé à Duékoué. J’ai écourté mon séjour et je suis revenu ici. En tant que Représentant spécial, j’aimerais avant toute chose, réitérer nos condoléances sincères aux familles des victimes de cette tragédie et à la nation ivoirienne toute entière. J’aimerais également réitérer que tout doit être fait pour empêcher que de tels désastres se répètent en Côte d’Ivoire. J’en ai parlé hier, comme vous l’avez probablement vu dans la déclaration de presse, avec les différents ministres du Gouvernement, sur la nécessité d’investir dans la paix et la sécurité, mais aussi dans la fin de l’impunité. Ce groupe de ministres ira, je crois aujourd’hui ou demain, à l’ouest. J’ai parlé avec tous les députés de l’ouest ; nous avons également parlé avec la population Wê, avec la LIDHO et d’autres organisations. Beaucoup a été dit sur la question de la responsabilité. J’avais dit auparavant quelque chose se rapportant à la vision du Conseil de sécurité sur ce sujet. Avant hier soir, sur une chaine de télévision étrangère, en l’occurrence TV% Monde, le Chef de l’Etat de Côte d’Ivoire, le Président Alassane Ouattara, a rappelé exactement le rôle de l’ONUCI. J’ai beaucoup apprécié cela et ce qu’il a dit est tout à fait conforme à notre mandat tel qu’il est établi par le Conseil de sécurité. Je vais faire l’historique du camp de Nahibly ; je m’excuse car je vais prendre un peu de votre temps, mais j’ai l’obligation d’être précis sur ce qui s’est passé à Nahibly ainsi que ce que nous faisons maintenant. Nahibly est le dernier camp des déplacés qui restait en Côte d’Ivoire. Comme vous le savez, il y avait eu plusieurs camps mais dans tous les autres, les Nations Unies ont aidé à sécuriser le retour volontaire des déplacés.
Sur la base d’un échange de lettres avec le Gouvernement, un terrain a été octroyé et un camp a été construit à Nahibly en juin 2011 par le HCR et ses partenaires afin de décongestionner la Mission catholique. Ce camp avait plus de 4.400 personnes déplacées en mai 2012 : la plupart venaient des villages environnants comme Niambly et Carrefour. Le Gouvernement, à travers le Comité National de Coordination des Affaires Humanitaires (CNCAH), a exprimé sa préoccupation au sujet de la présence des personnes déplacées dans la région, et la communauté humanitaire a préparé un plan d’action pour adresser les préoccupations du Gouvernement. En novembre 2011, dans le cadre de la stratégie de facilitation du retour des déplacés, établie conjointement avec le Gouvernement et les acteurs humanitaires, Nahibly a été choisi pour abriter un site consolidé pour l’Ouest. En avril et mai 2012, le Gouvernement , le HCR et l’ONUCI, ont eu des discussions sur l’avenir du camp de Nahibly et sur le retour volontaire des déplacés. Nous avons formulé ensemble une politique d’enregistrement des déplacés pour leur retour volontaire et une stratégie pour diminuer ensemble le problème de sécurité à l’intérieur du camp – pour les déplacés et les travailleurs humanitaires – et à l’extérieur – pour les communautés.
A partir du mois de mars 2012, il y avait eu 14 attaques contre les travailleurs humanitaires dans le camp et, au mois de mai, le HCR a envoyé une lettre aux autorités relevant ces incidents, en leur informant que la distribution de vivres sera suspendue. Le 22 mai, des acteurs humanitaires ont été menacés par des individus au sein du camp. La police des Nations Unies (UNPOL) et les autorités locales ont décidé ensemble d’établir un poste de police conjoint dans le camp avec la présence d’UNPOL, du FPU [unité de police constituée] et de la police et gendarmerie nationales. Cependant, la police nationale a quitté le poste peu après.
Dans la nuit du 19 au 20 juillet, un braquage armé à Kokoma, un quartier de Duékoué, a occasionné la mort de cinq personnes. Suite à cet incident le camp de déplacés de Nahibly a été visité par des dozos qui voulaient entrer dans le camp, ce qui n’était pas permis.
Le matin du 20 juillet, une foule d’entre 500 et mille personnes se présente au camp. En ce moment, l’ONUCI avait 12 policiers à l’intérieur du camp et 10 militaires sur le périmètre extérieur, comme cela avait été convenu avec le Préfet de Duékoué. Selon l’information que nous avons maintenant, la police ivoirienne n’était pas dans ce camp. Vingt-quatre autres militaires sont ensuite venus en renfort. La foule a débordé le dispositif sécuritaire.
Sur la base des informations dont nous disposons maintenant, je suis en mesure d’affirmer qu’il aurait été impossible de protéger le camp sans tirer massivement sur la foule.
La foule a incendié le camp. Il y a eu six morts confirmés, 56 personnes blessées et environ 5.000 personnes déplacées enregistrées dans le camp ont été dispersées. Certaines personnes déplacées ont cherché refuge à la Mission catholique, à la mairie de Duékoué, à la Préfecture, dans le quartier Carrefour, dans les forêts environnantes, devant la base militaire de l’ONUCI.
Qu’est-ce que nous avons fait après l’incident ?
L’ONUCI a pris, immédiatement, des mesures pour protéger les personnes déplacées dans les sites mentionnés ci-dessus en renforçant sa présence militaire et policière. En même temps nous, les Nations Unies, nous avons réactivé notre plan de contingence humanitaire et nous avons entamé le processus de collecte d’informations sur les populations dispersées par l’attaque afin de savoir où elles se trouvent et quels sont leurs besoins, et pour leur fournir une assistance. Nous continuons à le faire.
Le Représentant spécial adjoint, M. Akodjénou, a tout de suite rencontré le Premier Ministre tandis que les fonctionnaires de l’ONU sur place à Duékoué ont eu des discussions avec les autorités locales. Le but de ces discussions était, notamment, de souligner que les forces de sécurité devaient assumer pleinement leur responsabilité de protéger les personnes et les biens, surtout là où se trouvent les personnes déplacées, de souligner que les droits fondamentaux des déplacés doivent être pleinement respectés, de souligner que tout retour doit être volontaire. Ces rencontres avaient aussi pour objectif d’informer les autorités des mesures mises en place par l’ONUCI pour éviter une détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire à Duékoué. Nous avons également réitéré que l’ONUCI continuera à jouer son rôle de contribuer aux efforts des autorités nationales pour assurer la sécurité des personnes déplacées et, d’une manière générale, des populations civiles.
Nous avons continué les consultations avec les autorités, ainsi que d’autres segments de la société ivoirienne, pendant toute la semaine. Hier, nous avons rencontré, comme je l’avais dit précédemment, un groupe de ministres qui s’occupent des affaires humanitaires, la LIDHO, et des élus et cadres de la région de l’Ouest.
Par ailleurs, l’ONUCI a lancé immédiatement une investigation qui cherchera, entre autres, à clarifier la manière dont son personnel a répondu à l’incident.
Nous sommes également en train de mener une opération de ratissage afin de vérifier s’il y a des corps additionnels dans les alentours de Duékoué. Cinquante-sept policiers (57) jordaniens, bangladais, pakistanais et ivoiriens à bord 11 véhicules y participent. Jusqu’à hier soir ils n’avaient retrouvé aucun autre corps.
Quelle est la situation actuelle?
Un calme relatif est revenu. L’ONUCI maintient à l’heure actuelle 192 militaires, et 158 policiers à Duékoué. Les forces de l’ONUCI font des patrouilles dans la ville de Duékoué ainsi que sur l’axe Man-Guiglo-Daloa, afin de contribuer à un environnement sécuritaire amélioré. 1,050 personnes déplacées ont été enregistrées et elles sont rentrées volontairement à 11 villages (Blody, Niambly, ToaZeo, Guehibly, Bahoubli, Diahouin, Delobly, Tienoula, Guezon, Teobli-Bangolo et Bangolo). Plusieurs autres sont revenues spontanément à leurs villages d’origine. Entre 70 et 100 personnes déplacées sont toujours à la Mairie et à la Préfecture.
Pour terminer, je tiens à souligner un certain nombre de choses :
- Les incidents de Duékoué - y compris les phénomènes de blâme collectif et de justice par la foule - soulignent la nécessité d’un processus de réconciliation solide et, en même temps, de la restauration de l’état de droit et de l’autorité de l’Etat à travers le pays.
- L’ONUCI continuera de fournir un appui aux autorités nationales pour qu’elles assurent la sécurité des personnes déplacées et la population de cette région.
- Conformément à son mandat, la mission continuera de contribuer à la protection des civils, qui demeure une responsabilité souveraine de l’Etat.
- Les effectifs supplémentaires déployés à Duékoué vont être maintenus pour le moment, et la présence civile sera renforcée.
- L’ONUCI salue le message du Président de la République, qui a affirmé que les auteurs des violences doivent répondre de leurs actions. Ce matin, j’ai pris l’initiative de voir tout ce qui est possible pour soutenir le procureur de Man et de m’adresser aussi à la Ministre de la Justice pour être sûr qu’il y a une investigation approfondie et que les personnes responsables de ces actes soient jugées.
- L’ONUCI tient à souligner que la justice doit être impartiale. Elle doit viser et les auteurs du braquage qui a été rapporté à Kokoma, et ceux qui ont fait partie de la foule, qui ont tué des gens à Nahibly et incendié le camp.
- L’ONUCI appelle à toutes les personnes et instances concernées à assumer leurs responsabilités en menant les investigations qu’il faut et en traduisant les auteurs présumés devant la justice. L’ONUCI fournira tout le soutien technique nécessaire.
- J’aimerais souligner que les forces de sécurité nationales doivent assumer pleinement leurs responsabilités dans la protection des personnes et des biens, surtout dans les zones où se trouvent les personnes déplacées.
- Les droits fondamentaux des déplacés doivent être respectés, et tout retour doit être volontaire.
- Le Gouvernement ivoirien, les élus et cadres de la région, les autorités locales, les chefs traditionnels, les représentants des diverses communautés doivent, ensemble, s’attaquer aux causes profonde de l’insécurité dans l’Ouest.
L’ONUCI reste disposé à contribuer à ces efforts conformément à son mandat.
Je vous remercie pour votre attention ; c’était un peu long mais il était important de vous éclaircir sur les messages du Conseil de sécurité et sur la situation à Duékoué. Merci beaucoup.
KB : Merci M le Représentant spécial. Vous pouvez maintenant poser des questions. N’oubliez pas de donner votre nom et l’organe de presse que vous représentez ici.
Loucoumane Coulibaly (Reuters) : Est-ce que vous pouvez nous parler du projet de réduction de l’effectif militaire. .. ?
BK : Oui. Le Conseil de sécurité a décidé de réduire les effectifs militaires de l’ONUCI d’un bataillon. Cela veut dire entre 750 et 850 personnes. Mais ils ont ajouté quelque chose d’important : Il faut le faire en termes de ce qui est pratique - par rapport à la situation à l’ouest, sur la base de notre mandat qui est sous chapitre 7 de la charte des Nations Unies, du fait aussi que nous sommes en train de faire une enquête sur les attaques de Para. Nous allons réduire d’un bataillon au cours de cette année. On a discuté avec le Conseil de sécurité et nous avons convenu que oui, il est possible de réduire en raison des avancées du pays et aussi comme signe au Gouvernement ivoirien, car la sécurité du pays est aussi sa responsabilité, mais nous comprenons aussi le contexte dans lequel nous sommes ; il faut une diminution au cours de l’année et ce, de façon pratique en prenant en compte de tous ces éléments de sécurité que nous avons eu ces derniers mois.
LC : On va diminuer, mais de combien sera le nombre de soldats et des policiers ?
BK : Le nombre des policiers ne diminue pas. C’est très important! Sur la base de ce que le Conseil de sécurité a demandé, nous pouvons maintenir le même effectif renforce des éléments de la police de la crise post électorale. La force militaire, quant à elle, sera diminuée d’un bataillon sur la base de nos analyses sécuritaires ici et la faisabilité de le faire en cours d’année. Comme vous le savez, le Conseil de sécurité a prolonge notre mandat d’un an. Je dois donc réduire cet effectif au cours de l’année, mais j’ai assez de flexibilité pour décider quand et où je dois le faire.
Leboucher (AFP): je voudrais vous poser deux questions. Vous aviez parle d’une enquête, du moins de voitures qui patrouillent à hauteur du camp pour chercher les morts. Vous n’en aviez apparemment pas trouvés. Vous émettez donc l’hypothèse qu’il y a eu plus de morts. Première question. Deuxième question. Vous avez parlé d’une foule de 500 à 1000 personnes ; est-ce que vous savez s’il y avait des Dozos où des FRCI dans cette foule
BK: Sur le premier point il s’agit sait de trouver s’il y avait plus de morts. Il y a des organisations qui ont affirmé qu’il y a eu plus de 200 morts. Si c’est le cas, je veux le savoir. C’est important de savoir combien de morts il y a eu à cause de cette crise. C’est pourquoi j’avais demandé à notre police de faire un ratissage pour voir si éventuellement il y a eu d’autres morts. Nous n’avons pas trouvé de corps ou les traces des corps. Cela ne veut pas dire que j’exclus la possibilité que le nombre de morts soit plus élevé. Je n’ai pas de preuves.
Bien sûr avec le HCR, notre police et les autorités, nous avons suivi toutes les pistes possibles et nous n’avons aucune indication qui nous prouve qu’il y ait eu plus de morts. C’est mon obligation, s’il y a des demandes, de faire des recherches. Pour le moment, je suis catégorique : il n’y a pas plus de morts que les chiffres qui ont été déjà avancés. Sur la deuxième question, excusez-moi, pouviez-vous la répéter.
PL S’il y avait des chasseurs Dozos dans la foule.
BK: Il y a encore des enquêtes ; à ce stade je ne peux pas être affirmatif. Ce que je peux vous dire, par contre, c’est que le matin, il y avait des dozos qui voulaient entrer dans le camp, ce que les humanitaires et notre police n’ont pas permis. Cela ne veut pas dire que nous ne voulons pas travailler. Quand il y a eu des problèmes dans le camp, nous avons eu notre structure UNPOL dans le camp, le contingent marocain autour du camp et la police ivoirienne, à qui nous avons demandé d’être présent. Celle-ci n’était pas présente. Mais ce qu’on fait en pareille circonstance, c’est qu’on laisse les autorités compétentes faire la justice. Ce n’est pas à une foule de faire justice. Ce n’est pas permis. Sur votre question je dirais qu’effectivement des dozos sont venus le matin. Etaient-ils dans la foule ? Je ne peux pas pour l’instant vous le dire. Nous faisons des enquêtes sur ce point.
Soro (alerte info): Lors d’une conférence de presse le Front Populaire Ivoirien [FPI], par la voix de son porte parole Laurent Akoun, a affirmé qu’il y a eu 211 morts, une centaine de blessés et une centaine de disparues. Je voudrais savoir si ce chiffre est confirmé. Ma deuxième préoccupation, c’est la question des MI 24 qui devaient être déployés par l’ONUCI, je ne sais pas si c’est encore à l’ordre du jour. […]
BK: J’ai bien lu la déclaration du FPI. Hier, j’ai eu une réunion avec une délégation du peuple Wè pour m’informer et pour leur présenter mes condoléances. J’ai été informé sur ce chiffre de 211. Je ne peux pas le confirmer. J’ai demandé à la délégation du peuple Wè de me donner des informations précises là-dessus. Elle ne l’a pas fait encore. S’ils ont ces informations je suis prêt à les recevoir. Je fais tout pour trouver les faits justes. Je le répète encore. Je n’exclus pas le fait qu’il y ait d’autres morts, mais à ce stade, je n’ai pas de confirmation et je n’ai pas d’indication qu’il y a plus de morts. Sur ces choses-là, il faut être très précis. Il ne faut pas donner des chiffres qui ne sont pas basés sur des faits. Mais l’ONUCI est très ouvert pour découvrir la vérité. C’est pour cela que nous avons des personnes sur le terrain. Il y a le HCR, une quarantaine de policiers sur le terrain. S’il y a des informations à donner à l’ONUCI, nous sommes prêts à les recevoir. Mais les faits sont plus importants. Dans un contexte très fragile avec des tensions entre les groupes ethniques, politiques et religieux, il faut être très précis sur les chiffres et la réalité. Je continue à le dire : la violence qui a entraine les morts et des blesses est inacceptable et la justice doit faire son travail.
Pour ce qui concerne les hélicoptères, dans la résolution du Conseil de sécurité, il a été adopté que les trois hélicoptères stationnés au Liberia viennent dans la ville de Man. Ils y seront pour la Côte d’Ivoire et pour le Liberia, pour aider nos forces à sécuriser la frontière des deux pays. C’est important pour notre mandat de protection des civils - comme nous l’avons fait a Para et dans d’autres localités - d’avoir une couverture aérienne. Ce ne sont pas des hélicoptères offensifs. Ils ne viennent pas pour faire la guerre. Ce sont des hélicoptères de surveillance dont l’objectif est de protéger les civiles.
Saint-Claver Oula (Nouveau Courrier) : M le Représentant spécial, vous aviez dit tout à l’heure que des humanitaires ont fait l’objet d’attaques dans le camp, sans plus. En même temps, il y a des autorités ivoiriennes, notamment le préfet, qui a donné une interview dans un organe de presse gouvernemental et il a dit que dans ce camp, il y a des milices, il y a des braqueurs qui se réfugient dans ce camp. Est-ce que les humanitaires qui ont fait l’objet d’attaque l’ont été de la part de ces milices dont il a été question ? J’aimerais que vous apportiez un peu plus de précision. Ce pour quoi les gens ont investi et attaqué le camp.
BK : Il n’y a jamais d’excuses pour une attaque d’une foule d’un camp. Le deuxième point, nous avons reçu des messages d’intimidation de quelques humanitaires dans les camps. C’est pour cela que nous avons convenu avec le préfet pour protéger ces humanitaires, de faire le travail dans le camp pour la population à l’intérieur du camp, d’avoir des Unpol pour réduire le problème, d’assister les déplacés […]. C’est cette politique que nous avons eu. D’une manière organisée, en prenant au sérieux les problèmes dans le camp et dans une période qui avait été convenue avec le gouvernement, c’est pour cette raison que je suis allé personnellement là-bas pour parler avec les humanitaires. Le problème était que des personnes dans le camp ont intimidé les humanitaires. Cela n’est pas acceptable et c’est pour cela que nous avons fait avec le gouvernement, l’organisation que je vous ai décrit il y a quelques minutes.
St CO : Lorsque les déplacés étaient dans le camp, il était question de favoriser leur retour dans leur village et ils avaient posé un certain nombre de préoccupations, notamment la sécurisation de leur retour et la sécurité, surtout dans les villages qu’ils ont quittés. Là, le camp a été attaqué, il a été détruit et il est question comme vous l’avez dit tout à l’heure de les accompagner dans les villages pour lesquels ils ont toujours posé le problème de sécurité. Est-ce que cette sécurité est garantie pour leur retour ?
BK : Il y avait toujours des citoyens qui voulaient revenir dans leur village, il y avait d’autres qui ne voulaient pas. Le principe humanitaire international est que cela se fait seulement sur la base du volontariat. Cela veut dire que ceux qui veulent retourner doivent avoir le droit de revenir et ceux qui ne veulent pas ont, en tout cas, une possibilité d’être protégés par les autorités et soutenus par l’ONUCI. C’est le premier point pour expliquer les principes. Le deuxième est que les gens qui veulent maintenant retourner dans leur village, et c’est la grande majorité des déplacés je crois, le font avec le HCR. Le HCR est sur le terrain, il fait aussi avec eux les investigations dans leurs villages : est-ce qu’il y a la sécurité ? Est-ce qu’il y a des problèmes de maisons ? de foncier ? etc. Et sur cette base, ils peuvent retourner là-bas et, si c’est nécessaire, notre police et aussi notre force qui, à leur demande, peuvent être sur place pour aider à la sécurisation. Je crois que la grande majorité veut retourner, les autres sont dans les différentes localités à Duékoué et sous protection. C’est ça la situation en ce moment. Nous allons voir dans les jours à venir comment la situation se développe. Le plus important maintenant, c’est de réduire la tension. Nous avons maintenant eu deux grandes attaques. A Para et à Duékoué. C’est dans une région où il y a eu beaucoup de problèmes politiques et interethniques. C’est maintenant la responsabilité des leaders de tous les côtés de réduire la tension, d’aider à sécuriser les différents villages. Comme je vous l’ai dit, nous avons l’obligation d’aider le gouvernement dans la protection des civils.
Abidjan, le 26 juillet 2012…
Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour la Côte d’Ivoire, M. Bert Koenders, s’est entretenu vendredi, 27 juillet 2012, avec la presse sur quelques-uns des messages-clefs de la Résolution 2062 du Conseil de Sécurité des Nations Unies et la situation à Duékoué depuis les événements de la semaine passé. C’était lors de la conférence de presse hebdomadaire de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire :
Kenneth Blackman (porte-parole adjoint de l’ONUCI) : Chers confrères et consœurs, bonjour. Aujourd’hui, on a un invité de marque, le Représentant spécial, qui va vous entretenir sur la nouvelle résolution et aussi sur ce qu’on fait suite aux événements dans l’Ouest. Je lui laisse la parole.
Bert Koenders : Merci beaucoup M. Blackman. Mesdames et messieurs les journalistes et chers collègues, bonjour. Comme M. Blackman l’a dit, je voudrais soulever deux points ce matin dans cette conférence de presse. Premier point, les grands messages de la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU après mes discussions, que je voudrais qualifier comme intensifs, à New York sur la situation ivoirienne et aussi je voudrais vous informer sur la situation après les événements à Duekoué la semaine dernière.
Vous savez, je reviens de New York dans le cadre de la présentation du 30e rapport du Secrétaire général de l’ONU sur la situation en Côte d’Ivoire. Permettez-moi, à titre d’information, de mentionner un certain nombre de points soulevés dans la résolution. Je crois qu’ils sont les plus importants dans le contexte de discussions que j’ai eues avec le Conseil de sécurité, qui a loué, du reste, les efforts consentis par les autorités ivoiriennes pour le retour progressif à la stabilité et à la normalité institutionnelle dans le pays.
Je voudrais commencer avec la situation des droits de l’homme, qui était soulignée par les membres du Conseil de sécurité. Je crois qu’il a eu une critique de la situation. La formulation est très précise.
Le Conseil de sécurité “Prie instamment le Gouvernement ivoirien de veiller le plus rapidement possible à ce que, quels que soient leur statut ou leur appartenance politique, tous les auteurs de violations graves des droits de l’homme ou d’atteintes au droit international humanitaire, en particulier celles commises pendant la crise postélectorale en Côte d’Ivoire, soient traduits en justice, comme le lui imposent ses obligations internationales”. Il prie également le Gouvernement de veiller, le plus rapidement possible “à ce que tous les détenus soient informés de leur statut en toute transparence et engage le Gouvernement ivoirien à continuer de coopérer avec la Cour pénale internationale”. Je lance donc un appel au Gouvernement ivoirien à mettre fin à l’impunité, et à donner aux détenus une idée claire de leur statut, et cela en toute transparence.
Un deuxième point souligné dans la résolution est la nécessité urgente de faire plus sur le plan de la justice et de la réconciliation. Cela est exprimé très clairement au paragraphe 10 de la résolution, dans lequel le Conseil, et je cite, « souligne qu’il faut prendre des mesures concrètes pour promouvoir la justice et la réconciliation à tous les niveaux et de tous les côtés, notamment en faisant participer activement les groupes de la société civile, l’objectif étant de remédier aux causes profondes des crises que connaît la Côte d’Ivoire”. Là, il y a une certaine demande du Conseil de sécurité d’accélérer le processus.
Toujours au niveau du paragraphe 10 de la résolution, le Conseil “exhorte le Gouvernement ivoirien à prendre des mesures concrètes pour prévenir et réprimer les violences intercommunautaires en essayant de dégager un large consensus national sur la façon de régler les questions d’identité et de propriété foncière”. Ca aussi, je crois, c’est un appel très clair du Conseil de sécurité aux Ivoiriens.
Un autre volet - j’ai mentionné droits de l’homme, justice - que je crois être important c’est le dialogue politique. Là, le Conseil de sécurité, dans mon opinion, a été très précis. Il « se félicite que le Gouvernement ait entrepris d’intensifier le dialogue politique avec l’opposition, y compris avec les partis politiques non représentés à l’Assemblée nationale,” - je crois que c’est le plus important - et “demande au Gouvernement ivoirien de continuer de prendre rapidement des mesures concrètes à cette fin et de ménager un espace politique à l’opposition”.
Je crois que, là aussi, le message est clair. Il demande au Gouvernement des mesures concrètes à ces fins et d’aménager un espace politique à l’opposition. En même temps, il demande à tous les partis politiques de jouer un rôle constructif et concourir à la réconciliation tout en me priant en tant que Représentant spécial du Secrétaire général Ban Ki-Moon, de continuer d’ exercer [mes] bons offices pour faciliter le dialogue entre tous les acteurs politiques”. Le message est aussi assez clair ici. Je pense que c’est quelque chose que nous n’avions pas vu encore, [cette] spécificité dans la résolution du Conseil de sécurité. Je crois que je ne vais pas évoquer tous les aspects de la résolution du Conseil de sécurité. […]
Sur le secteur de la sécurité, je crois que tout le monde sait que c’est une priorité du Gouvernement Ivoirien, c’est une priorité de tous les Ivoiriens en fait. Là, on est un peu spécifique qu’avant. Le Conseil “prie instamment le Gouvernement ivoirien d’accélérer la mise au point et l’exécution d’une stratégie globale de réforme du secteur de la sécurité, pour que soient mises sur pied des forces de sécurité sans exclusive et comptables de leurs actes, avec l’appui de l’ONUCI […] et d’autres partenaires internationaux concernés”. Je crois que c’est important “d’adopter d’autres mesures propres à inspirer une confiance accrue au sein des différents services chargés d’assurer la sécurité et de faire respecter la loi”, ainsi qu’entre ces services, “et de rétablir l’autorité de l’État dans tout le pays”.
Le DDR (désarmement, démobilisation et réintégration), je crois que je vais souligner ce point aussi, c’est l’avant dernier point sur la résolution. Bien sûr, cela constitue une grande priorité pour le Conseil. Au paragraphe 7 de la résolution, il “exhorte le Gouvernement ivoirien à concevoir et à exécuter rapidement un programme national de DDR, à définir des critères d’admission clairs et rigoureux, à créer une nouvelle base de données sécurisée et transparente, à mettre en place une autorité centrale chargée de superviser tous les éléments du programme de DDR et à trouver des solutions propices à l’intégration socioéconomique durable des ex-combattants”. La résolution “ engage aussi l’ONUCI à faciliter la planification et l’exécution des programmes. Le nouveau élément, c’est d’avoir une nouvelle base de données sécurisées et transparentes - une autorité pour faire avancer le DDR.
Sur le plan institutionnel, et là encore dans le cadre du processus démocratique, le Conseil de Sécurité définit clairement les conditions à remplir pour que les élections locales et régionales soient un outil réel de réconciliation ... Alors, après la question des droits de l’Homme, justice, DDR, je parle maintenant des élections locales qui ont été discutées avec une certaine intensité à la réunion du Conseil de sécurité. Le Conseil “demande au Gouvernement ivoirien et à tous les acteurs politiques de veiller à ce que les prochaines élections locales soient ouvertes, transparentes, libres et régulières et se déroulent dans le calme, et à ce qu’elles favorisent la représentativité politique et la réconciliation, en choisissant une date opportune, en assurant la sécurité et en procédant aux réformes électorales utiles”. Je crois que c’est le message le plus important du Conseil de sécurité pour avoir des élections de réconciliation. Donc, il est important de choisir une date opportune. C’est la décision, bien sûr, du gouvernement Ivoirien, être sûr que la sécurité est là, et procéder aux reformes électorales utiles. Cà, c’est spécifique dans la résolution. Et il a dit aussi qu’il incombe au premier chef au Gouvernement ivoirien d’organiser les élections locales, bien sûr, aux cotés des organisations du Gouvernement ivoirien, et autorise une assistance de l’ONUCI pour ces élections. Mais c’est très strict, parce qu’on dit « en fonction des ressources » que nous avons. Mais, je vous dis que nous n’avons pas beaucoup de ressources. Je crois que la consigne du Conseil est là : il y a la première responsabilité du Gouvernement; ces élections peuvent être un élément de réconciliation, mais il faut penser aux le timing approprié et aux éléments que j’ai mentionnés ; ca veut dire les reformes électorales utiles et la sécurité.
Je voudrais finir par ce message-clé du Conseil de sécurité aux Ivoiriens. C’est clair que le Conseil de sécurité a, dans sa résolution, aussi renforcé la politique de décentralisation de notre mission. Vous savez que nous avons ouvert des bureaux à Guiglo, à Toulepleu, à Tai… pour la nécessité que vous connaissez, et les zones à risque en particulier dans l’Ouest.
Le dernier point que je voudrais souligner [est que] le Conseil de Sécurité reste détermine à poursuivre son engagement vis-à-vis la Côte d’Ivoire en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, ce qui implique que les Nations Unies peuvent utiliser tous les moyens nécessaires pour protéger les civils et son mandat.
En ce qui concerne la situation dans l’Ouest du pays, je viens lentement de la résolution à la situation au camp de Nahibly. Je crois que c’est important, le Conseil de sécurité a aussi dit quelque chose sur la situation. Le Conseil condamne fermement “tout acte d’intimidation, toute menace et toute attaque visant des réfugiés et déplacés en Côte d’Ivoire, dont l’attaque du 20 juillet 2012” contre le camp de déplacés de Nahibly. Et il “rappelle que le Gouvernement ivoirien est le premier garant de la paix, de la stabilité et de la protection de la population civile en Côte d’Ivoire”. Ca, c’est la résolution du Conseil de sécurité, qui “rappelle que le Gouvernement ivoirien est le premier garant de la paix, de la stabilité et de la protection de la population civile en Côte d’Ivoire”.
J’aimerais maintenant que nous parlions de la situation dans l’Ouest du pays et de Nahibly. Je suis revenu immédiatement à Abidjan, après les discussions à New York. J’avais projeté d’autres plans, mais j’étais très touché et choqué, personnellement, par ce qui s’est passé à Duékoué. J’ai écourté mon séjour et je suis revenu ici. En tant que Représentant spécial, j’aimerais avant toute chose, réitérer nos condoléances sincères aux familles des victimes de cette tragédie et à la nation ivoirienne toute entière. J’aimerais également réitérer que tout doit être fait pour empêcher que de tels désastres se répètent en Côte d’Ivoire. J’en ai parlé hier, comme vous l’avez probablement vu dans la déclaration de presse, avec les différents ministres du Gouvernement, sur la nécessité d’investir dans la paix et la sécurité, mais aussi dans la fin de l’impunité. Ce groupe de ministres ira, je crois aujourd’hui ou demain, à l’ouest. J’ai parlé avec tous les députés de l’ouest ; nous avons également parlé avec la population Wê, avec la LIDHO et d’autres organisations. Beaucoup a été dit sur la question de la responsabilité. J’avais dit auparavant quelque chose se rapportant à la vision du Conseil de sécurité sur ce sujet. Avant hier soir, sur une chaine de télévision étrangère, en l’occurrence TV% Monde, le Chef de l’Etat de Côte d’Ivoire, le Président Alassane Ouattara, a rappelé exactement le rôle de l’ONUCI. J’ai beaucoup apprécié cela et ce qu’il a dit est tout à fait conforme à notre mandat tel qu’il est établi par le Conseil de sécurité. Je vais faire l’historique du camp de Nahibly ; je m’excuse car je vais prendre un peu de votre temps, mais j’ai l’obligation d’être précis sur ce qui s’est passé à Nahibly ainsi que ce que nous faisons maintenant. Nahibly est le dernier camp des déplacés qui restait en Côte d’Ivoire. Comme vous le savez, il y avait eu plusieurs camps mais dans tous les autres, les Nations Unies ont aidé à sécuriser le retour volontaire des déplacés.
Sur la base d’un échange de lettres avec le Gouvernement, un terrain a été octroyé et un camp a été construit à Nahibly en juin 2011 par le HCR et ses partenaires afin de décongestionner la Mission catholique. Ce camp avait plus de 4.400 personnes déplacées en mai 2012 : la plupart venaient des villages environnants comme Niambly et Carrefour. Le Gouvernement, à travers le Comité National de Coordination des Affaires Humanitaires (CNCAH), a exprimé sa préoccupation au sujet de la présence des personnes déplacées dans la région, et la communauté humanitaire a préparé un plan d’action pour adresser les préoccupations du Gouvernement. En novembre 2011, dans le cadre de la stratégie de facilitation du retour des déplacés, établie conjointement avec le Gouvernement et les acteurs humanitaires, Nahibly a été choisi pour abriter un site consolidé pour l’Ouest. En avril et mai 2012, le Gouvernement , le HCR et l’ONUCI, ont eu des discussions sur l’avenir du camp de Nahibly et sur le retour volontaire des déplacés. Nous avons formulé ensemble une politique d’enregistrement des déplacés pour leur retour volontaire et une stratégie pour diminuer ensemble le problème de sécurité à l’intérieur du camp – pour les déplacés et les travailleurs humanitaires – et à l’extérieur – pour les communautés.
A partir du mois de mars 2012, il y avait eu 14 attaques contre les travailleurs humanitaires dans le camp et, au mois de mai, le HCR a envoyé une lettre aux autorités relevant ces incidents, en leur informant que la distribution de vivres sera suspendue. Le 22 mai, des acteurs humanitaires ont été menacés par des individus au sein du camp. La police des Nations Unies (UNPOL) et les autorités locales ont décidé ensemble d’établir un poste de police conjoint dans le camp avec la présence d’UNPOL, du FPU [unité de police constituée] et de la police et gendarmerie nationales. Cependant, la police nationale a quitté le poste peu après.
Dans la nuit du 19 au 20 juillet, un braquage armé à Kokoma, un quartier de Duékoué, a occasionné la mort de cinq personnes. Suite à cet incident le camp de déplacés de Nahibly a été visité par des dozos qui voulaient entrer dans le camp, ce qui n’était pas permis.
Le matin du 20 juillet, une foule d’entre 500 et mille personnes se présente au camp. En ce moment, l’ONUCI avait 12 policiers à l’intérieur du camp et 10 militaires sur le périmètre extérieur, comme cela avait été convenu avec le Préfet de Duékoué. Selon l’information que nous avons maintenant, la police ivoirienne n’était pas dans ce camp. Vingt-quatre autres militaires sont ensuite venus en renfort. La foule a débordé le dispositif sécuritaire.
Sur la base des informations dont nous disposons maintenant, je suis en mesure d’affirmer qu’il aurait été impossible de protéger le camp sans tirer massivement sur la foule.
La foule a incendié le camp. Il y a eu six morts confirmés, 56 personnes blessées et environ 5.000 personnes déplacées enregistrées dans le camp ont été dispersées. Certaines personnes déplacées ont cherché refuge à la Mission catholique, à la mairie de Duékoué, à la Préfecture, dans le quartier Carrefour, dans les forêts environnantes, devant la base militaire de l’ONUCI.
Qu’est-ce que nous avons fait après l’incident ?
L’ONUCI a pris, immédiatement, des mesures pour protéger les personnes déplacées dans les sites mentionnés ci-dessus en renforçant sa présence militaire et policière. En même temps nous, les Nations Unies, nous avons réactivé notre plan de contingence humanitaire et nous avons entamé le processus de collecte d’informations sur les populations dispersées par l’attaque afin de savoir où elles se trouvent et quels sont leurs besoins, et pour leur fournir une assistance. Nous continuons à le faire.
Le Représentant spécial adjoint, M. Akodjénou, a tout de suite rencontré le Premier Ministre tandis que les fonctionnaires de l’ONU sur place à Duékoué ont eu des discussions avec les autorités locales. Le but de ces discussions était, notamment, de souligner que les forces de sécurité devaient assumer pleinement leur responsabilité de protéger les personnes et les biens, surtout là où se trouvent les personnes déplacées, de souligner que les droits fondamentaux des déplacés doivent être pleinement respectés, de souligner que tout retour doit être volontaire. Ces rencontres avaient aussi pour objectif d’informer les autorités des mesures mises en place par l’ONUCI pour éviter une détérioration de la situation sécuritaire et humanitaire à Duékoué. Nous avons également réitéré que l’ONUCI continuera à jouer son rôle de contribuer aux efforts des autorités nationales pour assurer la sécurité des personnes déplacées et, d’une manière générale, des populations civiles.
Nous avons continué les consultations avec les autorités, ainsi que d’autres segments de la société ivoirienne, pendant toute la semaine. Hier, nous avons rencontré, comme je l’avais dit précédemment, un groupe de ministres qui s’occupent des affaires humanitaires, la LIDHO, et des élus et cadres de la région de l’Ouest.
Par ailleurs, l’ONUCI a lancé immédiatement une investigation qui cherchera, entre autres, à clarifier la manière dont son personnel a répondu à l’incident.
Nous sommes également en train de mener une opération de ratissage afin de vérifier s’il y a des corps additionnels dans les alentours de Duékoué. Cinquante-sept policiers (57) jordaniens, bangladais, pakistanais et ivoiriens à bord 11 véhicules y participent. Jusqu’à hier soir ils n’avaient retrouvé aucun autre corps.
Quelle est la situation actuelle?
Un calme relatif est revenu. L’ONUCI maintient à l’heure actuelle 192 militaires, et 158 policiers à Duékoué. Les forces de l’ONUCI font des patrouilles dans la ville de Duékoué ainsi que sur l’axe Man-Guiglo-Daloa, afin de contribuer à un environnement sécuritaire amélioré. 1,050 personnes déplacées ont été enregistrées et elles sont rentrées volontairement à 11 villages (Blody, Niambly, ToaZeo, Guehibly, Bahoubli, Diahouin, Delobly, Tienoula, Guezon, Teobli-Bangolo et Bangolo). Plusieurs autres sont revenues spontanément à leurs villages d’origine. Entre 70 et 100 personnes déplacées sont toujours à la Mairie et à la Préfecture.
Pour terminer, je tiens à souligner un certain nombre de choses :
- Les incidents de Duékoué - y compris les phénomènes de blâme collectif et de justice par la foule - soulignent la nécessité d’un processus de réconciliation solide et, en même temps, de la restauration de l’état de droit et de l’autorité de l’Etat à travers le pays.
- L’ONUCI continuera de fournir un appui aux autorités nationales pour qu’elles assurent la sécurité des personnes déplacées et la population de cette région.
- Conformément à son mandat, la mission continuera de contribuer à la protection des civils, qui demeure une responsabilité souveraine de l’Etat.
- Les effectifs supplémentaires déployés à Duékoué vont être maintenus pour le moment, et la présence civile sera renforcée.
- L’ONUCI salue le message du Président de la République, qui a affirmé que les auteurs des violences doivent répondre de leurs actions. Ce matin, j’ai pris l’initiative de voir tout ce qui est possible pour soutenir le procureur de Man et de m’adresser aussi à la Ministre de la Justice pour être sûr qu’il y a une investigation approfondie et que les personnes responsables de ces actes soient jugées.
- L’ONUCI tient à souligner que la justice doit être impartiale. Elle doit viser et les auteurs du braquage qui a été rapporté à Kokoma, et ceux qui ont fait partie de la foule, qui ont tué des gens à Nahibly et incendié le camp.
- L’ONUCI appelle à toutes les personnes et instances concernées à assumer leurs responsabilités en menant les investigations qu’il faut et en traduisant les auteurs présumés devant la justice. L’ONUCI fournira tout le soutien technique nécessaire.
- J’aimerais souligner que les forces de sécurité nationales doivent assumer pleinement leurs responsabilités dans la protection des personnes et des biens, surtout dans les zones où se trouvent les personnes déplacées.
- Les droits fondamentaux des déplacés doivent être respectés, et tout retour doit être volontaire.
- Le Gouvernement ivoirien, les élus et cadres de la région, les autorités locales, les chefs traditionnels, les représentants des diverses communautés doivent, ensemble, s’attaquer aux causes profonde de l’insécurité dans l’Ouest.
L’ONUCI reste disposé à contribuer à ces efforts conformément à son mandat.
Je vous remercie pour votre attention ; c’était un peu long mais il était important de vous éclaircir sur les messages du Conseil de sécurité et sur la situation à Duékoué. Merci beaucoup.
KB : Merci M le Représentant spécial. Vous pouvez maintenant poser des questions. N’oubliez pas de donner votre nom et l’organe de presse que vous représentez ici.
Loucoumane Coulibaly (Reuters) : Est-ce que vous pouvez nous parler du projet de réduction de l’effectif militaire. .. ?
BK : Oui. Le Conseil de sécurité a décidé de réduire les effectifs militaires de l’ONUCI d’un bataillon. Cela veut dire entre 750 et 850 personnes. Mais ils ont ajouté quelque chose d’important : Il faut le faire en termes de ce qui est pratique - par rapport à la situation à l’ouest, sur la base de notre mandat qui est sous chapitre 7 de la charte des Nations Unies, du fait aussi que nous sommes en train de faire une enquête sur les attaques de Para. Nous allons réduire d’un bataillon au cours de cette année. On a discuté avec le Conseil de sécurité et nous avons convenu que oui, il est possible de réduire en raison des avancées du pays et aussi comme signe au Gouvernement ivoirien, car la sécurité du pays est aussi sa responsabilité, mais nous comprenons aussi le contexte dans lequel nous sommes ; il faut une diminution au cours de l’année et ce, de façon pratique en prenant en compte de tous ces éléments de sécurité que nous avons eu ces derniers mois.
LC : On va diminuer, mais de combien sera le nombre de soldats et des policiers ?
BK : Le nombre des policiers ne diminue pas. C’est très important! Sur la base de ce que le Conseil de sécurité a demandé, nous pouvons maintenir le même effectif renforce des éléments de la police de la crise post électorale. La force militaire, quant à elle, sera diminuée d’un bataillon sur la base de nos analyses sécuritaires ici et la faisabilité de le faire en cours d’année. Comme vous le savez, le Conseil de sécurité a prolonge notre mandat d’un an. Je dois donc réduire cet effectif au cours de l’année, mais j’ai assez de flexibilité pour décider quand et où je dois le faire.
Leboucher (AFP): je voudrais vous poser deux questions. Vous aviez parle d’une enquête, du moins de voitures qui patrouillent à hauteur du camp pour chercher les morts. Vous n’en aviez apparemment pas trouvés. Vous émettez donc l’hypothèse qu’il y a eu plus de morts. Première question. Deuxième question. Vous avez parlé d’une foule de 500 à 1000 personnes ; est-ce que vous savez s’il y avait des Dozos où des FRCI dans cette foule
BK: Sur le premier point il s’agit sait de trouver s’il y avait plus de morts. Il y a des organisations qui ont affirmé qu’il y a eu plus de 200 morts. Si c’est le cas, je veux le savoir. C’est important de savoir combien de morts il y a eu à cause de cette crise. C’est pourquoi j’avais demandé à notre police de faire un ratissage pour voir si éventuellement il y a eu d’autres morts. Nous n’avons pas trouvé de corps ou les traces des corps. Cela ne veut pas dire que j’exclus la possibilité que le nombre de morts soit plus élevé. Je n’ai pas de preuves.
Bien sûr avec le HCR, notre police et les autorités, nous avons suivi toutes les pistes possibles et nous n’avons aucune indication qui nous prouve qu’il y ait eu plus de morts. C’est mon obligation, s’il y a des demandes, de faire des recherches. Pour le moment, je suis catégorique : il n’y a pas plus de morts que les chiffres qui ont été déjà avancés. Sur la deuxième question, excusez-moi, pouviez-vous la répéter.
PL S’il y avait des chasseurs Dozos dans la foule.
BK: Il y a encore des enquêtes ; à ce stade je ne peux pas être affirmatif. Ce que je peux vous dire, par contre, c’est que le matin, il y avait des dozos qui voulaient entrer dans le camp, ce que les humanitaires et notre police n’ont pas permis. Cela ne veut pas dire que nous ne voulons pas travailler. Quand il y a eu des problèmes dans le camp, nous avons eu notre structure UNPOL dans le camp, le contingent marocain autour du camp et la police ivoirienne, à qui nous avons demandé d’être présent. Celle-ci n’était pas présente. Mais ce qu’on fait en pareille circonstance, c’est qu’on laisse les autorités compétentes faire la justice. Ce n’est pas à une foule de faire justice. Ce n’est pas permis. Sur votre question je dirais qu’effectivement des dozos sont venus le matin. Etaient-ils dans la foule ? Je ne peux pas pour l’instant vous le dire. Nous faisons des enquêtes sur ce point.
Soro (alerte info): Lors d’une conférence de presse le Front Populaire Ivoirien [FPI], par la voix de son porte parole Laurent Akoun, a affirmé qu’il y a eu 211 morts, une centaine de blessés et une centaine de disparues. Je voudrais savoir si ce chiffre est confirmé. Ma deuxième préoccupation, c’est la question des MI 24 qui devaient être déployés par l’ONUCI, je ne sais pas si c’est encore à l’ordre du jour. […]
BK: J’ai bien lu la déclaration du FPI. Hier, j’ai eu une réunion avec une délégation du peuple Wè pour m’informer et pour leur présenter mes condoléances. J’ai été informé sur ce chiffre de 211. Je ne peux pas le confirmer. J’ai demandé à la délégation du peuple Wè de me donner des informations précises là-dessus. Elle ne l’a pas fait encore. S’ils ont ces informations je suis prêt à les recevoir. Je fais tout pour trouver les faits justes. Je le répète encore. Je n’exclus pas le fait qu’il y ait d’autres morts, mais à ce stade, je n’ai pas de confirmation et je n’ai pas d’indication qu’il y a plus de morts. Sur ces choses-là, il faut être très précis. Il ne faut pas donner des chiffres qui ne sont pas basés sur des faits. Mais l’ONUCI est très ouvert pour découvrir la vérité. C’est pour cela que nous avons des personnes sur le terrain. Il y a le HCR, une quarantaine de policiers sur le terrain. S’il y a des informations à donner à l’ONUCI, nous sommes prêts à les recevoir. Mais les faits sont plus importants. Dans un contexte très fragile avec des tensions entre les groupes ethniques, politiques et religieux, il faut être très précis sur les chiffres et la réalité. Je continue à le dire : la violence qui a entraine les morts et des blesses est inacceptable et la justice doit faire son travail.
Pour ce qui concerne les hélicoptères, dans la résolution du Conseil de sécurité, il a été adopté que les trois hélicoptères stationnés au Liberia viennent dans la ville de Man. Ils y seront pour la Côte d’Ivoire et pour le Liberia, pour aider nos forces à sécuriser la frontière des deux pays. C’est important pour notre mandat de protection des civils - comme nous l’avons fait a Para et dans d’autres localités - d’avoir une couverture aérienne. Ce ne sont pas des hélicoptères offensifs. Ils ne viennent pas pour faire la guerre. Ce sont des hélicoptères de surveillance dont l’objectif est de protéger les civiles.
Saint-Claver Oula (Nouveau Courrier) : M le Représentant spécial, vous aviez dit tout à l’heure que des humanitaires ont fait l’objet d’attaques dans le camp, sans plus. En même temps, il y a des autorités ivoiriennes, notamment le préfet, qui a donné une interview dans un organe de presse gouvernemental et il a dit que dans ce camp, il y a des milices, il y a des braqueurs qui se réfugient dans ce camp. Est-ce que les humanitaires qui ont fait l’objet d’attaque l’ont été de la part de ces milices dont il a été question ? J’aimerais que vous apportiez un peu plus de précision. Ce pour quoi les gens ont investi et attaqué le camp.
BK : Il n’y a jamais d’excuses pour une attaque d’une foule d’un camp. Le deuxième point, nous avons reçu des messages d’intimidation de quelques humanitaires dans les camps. C’est pour cela que nous avons convenu avec le préfet pour protéger ces humanitaires, de faire le travail dans le camp pour la population à l’intérieur du camp, d’avoir des Unpol pour réduire le problème, d’assister les déplacés […]. C’est cette politique que nous avons eu. D’une manière organisée, en prenant au sérieux les problèmes dans le camp et dans une période qui avait été convenue avec le gouvernement, c’est pour cette raison que je suis allé personnellement là-bas pour parler avec les humanitaires. Le problème était que des personnes dans le camp ont intimidé les humanitaires. Cela n’est pas acceptable et c’est pour cela que nous avons fait avec le gouvernement, l’organisation que je vous ai décrit il y a quelques minutes.
St CO : Lorsque les déplacés étaient dans le camp, il était question de favoriser leur retour dans leur village et ils avaient posé un certain nombre de préoccupations, notamment la sécurisation de leur retour et la sécurité, surtout dans les villages qu’ils ont quittés. Là, le camp a été attaqué, il a été détruit et il est question comme vous l’avez dit tout à l’heure de les accompagner dans les villages pour lesquels ils ont toujours posé le problème de sécurité. Est-ce que cette sécurité est garantie pour leur retour ?
BK : Il y avait toujours des citoyens qui voulaient revenir dans leur village, il y avait d’autres qui ne voulaient pas. Le principe humanitaire international est que cela se fait seulement sur la base du volontariat. Cela veut dire que ceux qui veulent retourner doivent avoir le droit de revenir et ceux qui ne veulent pas ont, en tout cas, une possibilité d’être protégés par les autorités et soutenus par l’ONUCI. C’est le premier point pour expliquer les principes. Le deuxième est que les gens qui veulent maintenant retourner dans leur village, et c’est la grande majorité des déplacés je crois, le font avec le HCR. Le HCR est sur le terrain, il fait aussi avec eux les investigations dans leurs villages : est-ce qu’il y a la sécurité ? Est-ce qu’il y a des problèmes de maisons ? de foncier ? etc. Et sur cette base, ils peuvent retourner là-bas et, si c’est nécessaire, notre police et aussi notre force qui, à leur demande, peuvent être sur place pour aider à la sécurisation. Je crois que la grande majorité veut retourner, les autres sont dans les différentes localités à Duékoué et sous protection. C’est ça la situation en ce moment. Nous allons voir dans les jours à venir comment la situation se développe. Le plus important maintenant, c’est de réduire la tension. Nous avons maintenant eu deux grandes attaques. A Para et à Duékoué. C’est dans une région où il y a eu beaucoup de problèmes politiques et interethniques. C’est maintenant la responsabilité des leaders de tous les côtés de réduire la tension, d’aider à sécuriser les différents villages. Comme je vous l’ai dit, nous avons l’obligation d’aider le gouvernement dans la protection des civils.
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